SEXE, GENRE ET ÉGALITÉ DE DROITS

RAPPEL DE QUELQUES FAITS:
Suite à la publication du Rapport sur l’égalité des transgenres (Transgender Equality)1, le gouvernement britannique a l’intention de mener une consultation concernant une modification de sa Loi sur la reconnaissance du genre (Gender Recognition Act). Cette démarche aura des impacts significatifs sur les personnes trans et sur d’autres, en particulier les femmes, les enfants et les communautés gaie et lesbienne.
La présente fiche d’information, préparée par la Sex And Gender Ethics Society (SAGES), explique les changements proposés et certaines de leurs incidences. La Sex and Gender Ethics Society (SAGES) existe pour promouvoir des approches fondées sur des preuves empiriques en ce qui concerne les enjeux de sexe et de genre au Royaume-Uni. Nous préconisons de privilégier la recherche dans les domaines de l’éducation, de la formation et du développement de services. Notre objectif principal est d’assurer la protection des droits égaux de l’ensemble des personnes, sans distinction de sexe ou de genre.
Définitions
  • Le genre signifie des rôles, des caractéristiques et des comportements socialement construits : par exemple, les femmes peuvent être perçues comme plus capables d’empathie et adaptées à des rôles de soignantes, tandis que les hommes peuvent être considérés comme logiques, aguerris et adaptés aux emplois techniques.
  • Le sexe fait référence à des caractéristiques biologiques et physiologiques : par exemple, les hommes ont un pénis, les femmes ont un vagin. En Grande-Bretagne, les expressions « male » et « female » sont utilisées sur les certificats de naissance pour indiquer le sexe de chaque personne.
Dans le langage courant, les mots « sex » et « gender » sont souvent utilisés de façon interchangeable. Cependant, dans la recherche scientifique, les mots « sex » et « gender » sont traités séparément. Dans cette fiche informative, nous utilisons « male » et « female » pour désigner le sexe constaté à la naissance. Nous utilisons le mot « femme » (woman) pour désigner une personne dont le sexe à la naissance est féminin. Nous utilisons l’expression « homme trans-identifié » (trans identified male) pour désigner une personne trans dont le sexe de naissance est masculin (ceux-ci peuvent se désigner comme femme, femme trans, transsexuel·le ou personne non binaire, par exemple).
  • La réassignation de genre est le processus de transition d’un genre à l’autre. Une faible proportion des personnes trans-identifiées subissent un traitement médical (hormones, chirurgie ou les deux)2, et beaucoup transforment leur apparence, mais ces changements ne sont pas obligatoires3.
  • Il est impossible de changer de sexe, même avec un traitement médical.
  • L’identité de genre est le sentiment interne qu’a une personne de son propre genre, qu’il soit ou non conforme aux normes sociétales.
  • La dysphorie de genre est le terme médical servant à désigner le vécu d’une personne qui souffre parce qu’elle s’identifie à un genre qui diffère de son sexe enregistré à la naissance.
La loi actuelle et les changements proposés
  • Le sexe et le genre réassigné sont tous deux des caractéristiques protégées en vertu de la Loi de 2010 sur l’égalité (Equality Act 2010).
  • En vertu de la Loi de 2004 sur la reconnaissance du genre (Gender Recognition Act 2004), toute personne souhaitant changer son genre légal peut demander un Certificat de reconnaissance de genre. Cette personne doit avoir vécu selon son nouveau genre pendant deux ans et avoir reçu un diagnostic médical de dysphorie de genre, mais l’on ne requiert pas de traitement médical.
Le Rapport sur l’égalité des transgenres1 a formulé les recommandations suivantes (entre autres) :
  • Auto-déclaration. Pour faciliter les changements légaux de genre des personnes trans-identifiées, la nécessité d’un diagnostic médical devrait être retirée. Les certificats de reconnaissance du genre devraient être émis aux termes d’un processus administratif simple d’auto-déclaration de l’identité de genre. Cette règle s’appliquerait aux adultes et aux 16-17 ans.
  • La caractéristique protégée de « genre réassigné » inscrite dans la Loi de 2010 sur l’égalité devrait être remplacée par celle d’« identité de genre ».
  • Il ne doit exister aucune exclusion de personnes trans-identifiées, sous aucune circonstance. Une personne possédant un certificat de reconnaissance du genre ne doit jamais être exclue d’une occupation ou d’un service unisexe réservé aux personnes de son genre acquis.
Qu’est-ce que cela signifie en pratique?

Cette démarche aura des impacts significatifs sur les personnes trans et sur d’autres, en particulier les femmes, les enfants et les communautés gaie et lesbienne.

Actuellement, les organisations qui proposent des services unisexes dans des situations délicates peuvent exclure les personnes de l’autre sexe si c’est un moyen pondéré d’atteindre un but légitime3,4. Par exemple, un service destiné aux femmes ayant subi une agression sexuelle pourrait empêcher un homme trans-identifié d’y travailler comme thérapeute ou d’avoir accès à un groupe de thérapie pour femmes à cet endroit.
Selon les nouvelles recommandations, ce ne serait plus le cas. Un homme pourrait légalement changer de genre pour se désigner comme « féminin » ou « femme » par auto-déclaration – aucun diagnostic médical de dysphorie de genre ou autre évaluation ne serait nécessaire, et il n’aurait pas besoin de modifier quoi que ce soit dans sa vie, comme changer d’apparence ou subir un traitement médical.
Cette personne serait alors admissible à fréquenter le service de thérapie réservé aux femmes dans notre exemple ou d’y travailler1.
La communauté trans du Royaume-Uni
  • On estime à environ 650 000 personnes (1 sur 100) la communauté trans du Royaume-Uni2, mais seulement quelques-unes de ces personnes possèdent un certificat de reconnaissance du genre.
  • En 2015, environ 5% des personnes trans au Royaume-Uni avaient demandé un traitement médical. On s’attend à ce qu’environ 20% d’entre elles le fassent au bout du compte2.
  • Le nombre de personnes présentant une dysphorie de genre est beaucoup plus faible que le nombre de personnes trans-identifiées. Environ 1 homme adulte sur 14 700 et 1 femme adulte sur 38 500 souffrent de dysphorie de genre5.
  • Si la dysphorie de genre est supprimée comme condition d’un changement de genre légal, beaucoup plus de personnes trans-identifiées auront le privilège de franchir cette étape et d’avoir accès à des services de nature délicate réservés aux personnes de l’autre sexe.
Espaces, services et autres dispositions réservées aux femmes
  • Les changements proposés permettraient aux hommes trans-identifiés d’accéder à des espaces réservés aux femmes comme les vestiaires, les refuges, les salles d’hôpital, les prisons et les dortoirs, sans exceptions.
  • 80 à 95% de ces hommes trans-identifiés n’auront pas reçu de traitement médical dans le cadre de leur transition2.
  • Les trois quarts des crimes violents6 et 98% des délits sexuels7 sont commis par des hommes.
  • Les renvois à des services de réassignation de genre de prisonniers reconnus coupables de délits sexuels graves sont beaucoup plus nombreux que les renvois de prisonniers reconnus coupables de délits non sexuels8.
  • On avertira les femmes et les filles que se plaindre de la présence d’hommes trans-identifiés dans leurs vestiaires constitue maintenant un crime à caractère haineux9.
Soins et contacts intimes et services réservés aux femmes
  • Les femmes handicapées et âgées qui préfèrent une aide-soignante pour se laver, s’habiller et ainsi de suite n’auront plus la certitude d’en obtenir une.
  • Les femmes qui veulent rencontrer une professionnelle pour une thérapie ou pour des soins intimes tels un essayage de soutien-gorge ou des soins gynécologiques, comme un test de frottis, une mammographie, une contraception, une grossesse et un accouchement, risquent de trouver ces procédures difficiles à organiser.
  • Des policiers et des agents de sécurité masculins trans-identifiés pourront effectuer des fouilles corporelles sur des femmes.
Sports
  • On voit déjà des hommes trans-identifiés participer à des compétitions sportives de femmes et y remporter des médailles.
  • Les directives du Comité olympique international sur les catégories de genre dans les sports se contentent d’établir des règles sur les taux de testostérone admis10. Mais les hommes mesurent en moyenne 14 cm de plus, avec 10% de plus de capacité pulmonaire et des os plus solides. Ces avantages sont conservés par les hommes trans-identifiés qui ont subi un traitement médical.
  • Dans certaines écoles et universités, des enfants et des jeunes trans-identifiés peuvent participer à des compétitions en fonction de leur identité de genre, sans avoir subi de traitement médical.
Enfants et jeunes
  • La recherche scientifique dans ce domaine est encore embryonnaire et il n’y a pas de consensus entre les spécialistes sur les causes sous-jacentes de la dysphorie de genre chez les enfants ou la meilleure approche pour la traiter11.
  • Les références aux services de réassignation de genre des moins de 18 ans ont augmenté de 2000% au cours des huit dernières années12, et l’on observe des indications d’une contagion sociale13.
  • Un nombre croissant de personnes cherchent à inverser leur processus de transition de genre14,15, mais tous les changements ne peuvent pas être inversés.
Faciliter le processus de transition risque d’augmenter le nombre de jeunes personnes vulnérables qui regretteront de s’y être livrées.
La communauté lesbienne et gaie
  • Les lesbiennes et les hommes gais sont attirés par les personnes sur la base de leur sexe et non de leur identité de genre. Les nouvelles lois sur l’identité de genre peuvent les empêcher de mettre sur pied des événements et des organisations unisexes.
  • Les lesbiennes en particulier sont victimes d’intimidation et accusées de transphobie parce qu’elles tiennent à s’allier à des femmes et non à des hommes qui s’identifient comme femmes16; elles sont attaquées même lorsque ces hommes conservent leur pénis.
  • La majorité des enfants souffrant de dysphorie de genre cessent d’être dysphoriques à l’âge adulte, mais une proportion élevée d’entre eux et d’entre elles deviennent attiré·e·s par les personnes du même sexe17. L’homophobie demeure très répandue au Royaume-Uni et est le deuxième motif en importance des crimes à caractère haineux (après l’origine ethnique)18. Cela suggère que, dans certains cas, l’homophobie peut être le motif amenant à la transition de genre des personnes attirées par les gens de leur sexe ou amenant des parents à encourager leurs enfants à transiter et être donc considérés comme hétérosexuels.

    Faciliter le processus de transition risque d’augmenter le nombre de jeunes personnes vulnérables qui regretteront de s’y être livrées.

L’importance des mots
  • Les changements juridiques proposés enlèveront toute signification au mot « femme ». Les femmes sont les adultes de sexe féminin : les membres de la classe de sexe susceptibles d’être enceintes. Avec la nouvelle loi, une « femme » deviendra « quiconque s’identifie comme femme ».
Cela ne changera pas la réalité matérielle. La moitié de la population qui possède la capacité réelle ou perçue de porter des enfants continuera à subir une discrimination en raison de son sexe et continuera à devoir s’organiser ensemble pour en parler19.
La Sex and Gender Ethics Society estime que les personnes trans-identifiées doivent avoir le droit de vivre leur vie comme elles le veulent, avec une protection complète contre les violences et la discrimination et l’apport de services appropriés et sensibles. Mais d’autres secteurs de la société, en particulier les femmes et les enfants, les lesbiennes et les gais, méritent une considération égale, et les changements envisagés à la loi n’atteignent pas cet équilibre. Nous appelons à une considération égale des droits, de la sécurité, de la dignité et de la protection de tous ces groupes.
Notes :
1 House of Commons Women and Equalities Commitee. Transgender equality, First report of session 2015-16, 2016.
2 Reed T. Written evidence submitted by GIRES to the Transgender Equality Inquiry, 2015.
3 Equality Act 2010 statutory code of practice. Services, public functions and associations.
4 Whitfield L. How legislation protects women-only spaces and services: an overview, 2016.
5 Arcelus J et al. Eur Psychiatry 30:807–815 (2015).
6 Office of National Statistics (ONS), Overview of violent crime and sexual offences, 2017.
7 Ministry of Justice, Home Office – ONS. An overview of sexual offending in England and Wales, 2013.
8 Barret J. Written evidence submited by British Association of Gender Identity Specialists to the Transgender Equality Inquiry, 2015.
9 CPS. Lesbian, gay, bisexual and transgender hate crime. Schools project.
10 IOC consensus meeting on sex reassignment and hyperandrogenism, Nov 2015.
11 Vrouenraets LJ et al. J Adolesc Health 57(4):367–373 (2015).
12 NHS. GIDS referrals figures for 2016/17.
13 Litman L. J Adolesc Health 60(2):S83–S126 (2017).
14 Stella C. Female detransiton and reidentification: Survey results and interpretation, 2016.
15 Hurst G. « Bath Spa University bars research into transgender surgery regrets ». The Times, 23 Sept 2017.
16 Yardley M. « The confict between feminism and the transgender movement ». Morning Star, 24 Dec 2014.
17 APA. DSM-5, 2013.
18 Home Office. Hate crime, England and Wales, 2015/16, 2016.
19 Tunks K. « Sex matters ». Morning Star, 9 Aug 2017.
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