La Marche des femmes a regroupé quelque 4,2 millions de manifestant-e-s le weekend dernier, aux États-Unis uniquement, en faisant la plus grande manifestation de l’histoire de ce pays.
Mais l’opposition masculiniste ne dérougit pas.
Une femme remettant en question l’idéologie de l’identité de genre, lors de la Marche des femmes de Vancouver, est devenue l’objet d’une vague d’insultes et de menaces sur Internet.
Mais l’opposition masculiniste ne dérougit pas.
Une femme remettant en question l’idéologie de l’identité de genre, lors de la Marche des femmes de Vancouver, est devenue l’objet d’une vague d’insultes et de menaces sur Internet.
22 janvier 2018, par MEGHAN MURPHY, sur le blogue FeministCurrent.com
Un peu plus d’une semaine avant la tenue de la Marche des femmes à Vancouver, en Colombie-Britannique, March On (l’organisme responsable de l’organisation de l’événement cette année) a annoncé que l’un de ses conférenciers serait un homme s’identifiant comme « dominatrice sexuelle ».
Des femmes de partout ont exprimé leur stupeur et leur colère face à ce
choix. Il s’agissait, après tout, d’une manifestation destinée aux
femmes, en réaction initiale à la présidence de Donald Trump, un défilé
destiné à renforcer la solidarité entre les femmes, à soutenir nos
droits humains et reproductifs et à combattre la misogynie et la
violence masculine envers les femmes. Pourquoi diable, alors, serait-il
approprié d’inviter un homme pour promouvoir la prostitution et la
violence sexualisée lors de cet événement ?
March On Vancouver a immédiatement bloqué
sur son fil Twitter toutes les personnes qui remettaient en cause cette
décision, en indiquant clairement que non seulement elle n’était pas
sujette à discussion, mais que les femmes troublées par leur choix de
conférenciers n’étaient pas les bienvenues à l’événement.
Inutile de dire que je n’ai pas participé
à cette manifestation samedi. Mais beaucoup d’autres femmes l’ont fait,
dont une qui portait une pancarte où l’on pouvait lire, d’un côté :
On pouvait lire de l’autre côté du panneau :
J’ai d’abord pris connaissance de cette pancarte parce qu’une femme
nommée Meaghan Jackson-Doucet s’était permis d’afficher sur Facebook, en
mode « Public »*, une photo
de cette femme avec son affiche, en l’accusant de « haine transphobe ».
Ce message et la photo ont tout de suite connu une diffusion immense.
Au moment où j’écris ces lignes, le message de Jackson-Doucet compte
près de 2000 commentaires, dont j’ai lu la plupart. Beaucoup d’entre eux
exhibent un niveau stupéfiant de vitriol et de haine. Une foule de gens
ont appelé à dévoiler l’identité de cette manifestante et beaucoup
d’autres l’ont ouvertement menacée de violence. D’autres encore ont dit
que sa pancarte aurait dû être détruite et qu’elle aurait dû être
expulsée de la manifestation.
J’ai parlé à cette manifestante, qui a
demandé à rester anonyme, et elle m’a dit que Jackson-Doucet avait pris
la photo subrepticement, à partir du niveau de sa taille, pendant un
discours, sans tenter de parler à la femme qu’elle photographiait.
Le transfemme Morgane Oger,
vice-président de la section Colombie-Britannique du Nouveau parti
Démocratique et président de la Trans Alliance Society, a également affiché l’image
sur sa page Facebook, en demandant au public d’identifier la femme qui
tenait le panneau. « C’est un discours de haine, » a prétendu Oger qui
annoncé son intention de porter plainte pour offense aux droits de la
personne contre cette manifestante, en disant qu’il avait besoin de
l’identifier à cette fin.
Pour dire les choses clairement, une
femme est aujourd’hui menacée d’actes de violence et de répercussions
juridiques pour avoir déclaré, lors d’une marche destinée aux femmes,
que les femmes sont de sexe féminin et pour avoir contesté une idéologie
qui prétend que le genre est une réalité interne
et biologique, plutôt qu’imposé par une société patriarcale. Non
seulement a-t-on martelé aux femmes qu’elles n’avaient pas le droit de
mettre l’accent sur leur corps lors des nombreuses marches de femmes
organisées partout au monde, mais, lorsqu’elles osent défier l’idée que
les hommes s’identifiant comme trans devraient avoir le haut du pavé
lors de ces manifestations, elles sont expulsées et harcelées.
Messages affichés sur Twitter le 20 janvier par un autre transfemme britannique, Munroe Bergdorf :
C’EST VRAIMENT FINI! (détournement du slogan « C’est fini » du mouvement féministe contre les agressions sexuelles)
« Protester n’est pas
pour tout le monde, mais si vous êtes à Londres et que vous êtes prêt ou
capable de prêter votre voix et votre présence au rallye
@womensmarchlon de demain, vous devriez le faire, la sororité a besoin
de vous! »
« Je tiens également à
souligner que si vous y assistez, il est CRUICIAL (sic) que vous le
fassiez avec un état d’esprit INTERSECTIONNEL. Donner la priorité aux
systèmes reproductifs au cœur de ces manifestations est réducteur et
excluant. »
La femme qui tenait cette pancarte à Vancouver m’a dit que beaucoup de gens ont hué et grommelé pendant le discours de Kreut (la dominatrice), proposeur d’une politique récente
de boycottage et de désaffiliation de l’organisme Vancouver Rape Relief
au congrès 2016 de la BC Federation of Labour. Dans son discours, Kreut
(dont le nom de dominatrice est « Hailey Heartless ») a préconisé une
décriminalisation des proxénètes, des propriétaires de bordels et des
acheteurs de sexe. (La loi canadienne actuelle a décriminalisé
les personnes qui vendent du sexe et maintenu la criminalisation de
ceux qui en achètent, ainsi que celle des proxénètes et des tenanciers
de bordels). Il s’en est également pris aux centres de crise pour
victimes de viol et aux féministes qui soutiennent le modèle nordique.
Kreut a dit, bizarrement, que les « travailleurs du sexe » comme lui
étaient précieux parce qu’ils pouvaient donner aux femmes des conseils
de maquillage et de vernis à ongles. Il a ajouté :
« Quand vous nous accueillerez dans vos
espaces, et que vous nous permettrez d’être ouverts et francs, vous
constaterez que nous avons tant de connaissances à vous apporter, et pas
seulement sur la façon d’avoir des rapports sexuels incroyables.
« Nous pouvons vous enseigner des
compétences de vie, comment prendre des selfies magnifiques, comment
utiliser Bitcoin, comment se créer un auditoire dans les médias sociaux.
« Nous pouvons vous enseigner des leçons
sur vous-même, comme l’art de pratiquer une excellente hygiène, comment
se tracer des contours incroyables pour les lieux peu éclairés, ou
comment prendre soin de soi de manière radicale. »
Promouvoir la prostitution comme un
travail comme un autre ou comme un choix habilitant est une position
incroyablement inappropriée à défendre lors d’une manifestation
féministe. Voir un homme promettre d’inculquer à des femmes comment se
faire les ongles et « prendre des selfies étonnants » lors d’un tel
événement devrait être interprété comme une parodie, mais c’est
apparemment la nouvelle normalité, en ce qui concerne les responsables
de l’événement March On.
Ce à quoi nous assistons n’est pas une
nouvelle vague, mais un mouvement de ressac. Nous ne devons pas
permettre que notre mouvement soit détourné par des hommes qui font la
promotion d’idées et d’industries misogynes, comme le commerce du sexe.
La Marche des femmes est destinée aux femmes. Reprenons-la en main.
*NOTE DE L’ÉDITRICE – 23/01/2018: Ce message public affiché sur Facebook a été supprimé depuis. Le texte ci-dessus a été modifié pour y inclure le commentaire de Jackson-Doucet joint à l’image affichée.
Meghan MurphyTraduction: TRADFEM
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