Campagne #ExMuslimBecause : "Ex-musulmane car j’ai vécu sous un régime islamique en Iran"
Interview de Maryam Namazie
Par Francine Sporenda
Maryam Namazie est une militante iranienne des droits
humains et des droits des femmes engagée dans la lutte contre l’islam
politique et pour la laïcité. Elle est la porte-parole de Iran
Solidarity, de One Law for All et du Conseil des ex-musulmans de
Grande-Bretagne (CEMB) et de Fitnah, mouvement pour la libération des
femmes dont les objectifs sont la liberté et l’égalité, la défense de
la laïcité, la fin des lois et traditions religieuses et culturelles
misogynes, du voilement obligatoire, de la ségrégation sexuelle, du
trafic prostitutionnel et des violences contre les femmes.
FS : Que pensez-vous du concept d’ « islamophobie » ?
MN : L’ « islamophobie » est un terme politique qui
est agité comme un épouvantail pour imposer silence aux gens. C’est une
tentative des islamistes et de leurs apologistes pour empêcher toute
critique de l’islam et du mouvement islamiste en confondant la critique
absolument nécessaire des religions et le fait de nuire aux musulmans.
Critiquer les religions et la droite religieuse, ça n’est pas attaquer
les croyants, clairement, ce sont deux choses différentes. Les confondre
vise à protéger le mouvement islamiste de ceux qui le contestent.
FS : Vous dites que la gauche occidentale a deux
catégories de politique « progressiste » : celle qu’ils veulent pour
eux, le mariage pour tous, l’égalité des droits etc. Et celle qui est
appropriée pour les « musulmans ». Pouvez-vous développer sur ce double
standard ?
MN : Les « progressistes » qui se rangent souvent aux
côtés des islamistes contre nous, les contestataires, sont
progressistes quand il s’agit de leur vie et de leurs droits. Ils
veulent—légitimement—le mariage gay, avoir le contrôle de leur corps, le
droit d’être athée et de critiquer le christianisme, le droit d’avoir
des relations sexuelles hors mariage, de danser, d’aimer, de se moquer
du pape et du Vatican, mais quand il s’agit de nous, nous devenons à
leurs yeux des « autochtones » et des « noix de coco » si nous demandons
la même chose (1).
FS : Vous dites que les positions anticolonialistes
de la gauche occidentale sont en fait les positions des classes
dirigeantes autoritaires des « pays musulmans ». Pouvez-vous expliquer
cette affirmation ?
MN : Quand vous vous ralliez aux politiques
identitaires et que vous vous identifiez à des communautés ou sociétés
culturellement homogènes, vous passez dans le camp de ceux qui les
dirigent, ce qui fait que cette gauche finit toujours par se rallier aux
classes dirigeantes, jamais aux contestataires. Les politiques
identitaires n’admettent que les religions et les cultures homogènes et
sont incompatibles avec les politiques de classe et les mouvements
politiques et sociaux.
FS : Que pensez-vous du concept d’ »exercice
responsable de la liberté d’expression » qui a été défendu par Tariq
Ramadan et plusieurs intellectuels occidentaux après l’attentat de
Charlie Hebdo ?
MN : Appeler à un usage « responsable » ou
« inoffensif » de la liberté d’expression, c’est tenter de la
restreindre. Là où les islamistes sont au pouvoir, ceux et celles qui
critiquent la religion sont persécutés pour blasphème ou apostasie.
Dans les pays occidentaux, les islamistes et leurs
partisans appellent à un « exercice responsable de la liberté
d’expression » et condamnent leurs critiques comme « islamophobes » et
racistes parce qu’ils veulent imposer de facto des lois contre le
blasphème. Aussi cet appel implique que c’est la victime qui doit être
blâmée pour avoir offensé ceux qui seraient ensuite « obligés » de la
tuer en réponse à cette « offense ».
Ça revient à placer la responsabilité des violences
sur la victime et non sur les perpétrateurs. Il nous arrive tous d’être
offensés, à un moment ou à un autre—moi, c’est la religion qui
m’offense—mais appeler à la libre expression « responsable » en face de
la violence, c’est excuser cette violence, comme si des caricatures et
le blasphème étaient pires que le meurtre.
FS : Pouvez-vous nous parler des « tribunaux
islamiques » en Angleterre et nous expliquer pourquoi ils violent
systématiquement les droits des femmes ?
MN : Ici en Grande-Bretagne, les « tribunaux
islamiques » s’occupent des affaires familiales—et ce ne sont pas des
questions triviales comme on les décrit souvent ; au contraire, elles
sont centrales au projet islamiste de contrôle des femmes et ce sont des
domaines où les plus grandes violations des droits des femmes « issues
des minorités » ont lieu.
Ici en Grande-Bretagne, ce projet pour contrôler les
femmes est souvent présenté comme un « choix », et un « droit »– alors
que ce n’est ni l’un ni l’autre.
FS : De nombreuses féministes défendent le « droit à
se voiler » mais jamais le droit de se dévoiler. Considérez-vous que
cela constitue une trahison ?
MN : Bien sûr que c’est une trahison. Que des
féministes défendent le droit des islamistes de contrôler et de faire
disparaître le corps des femmes comme source de honte et de fitnah
(chaos) est la plus grande des trahisons.
MN : Vous avez appelé à un bannissement du niqab. Pouvez-vous expliquer pourquoi il devrait être banni ?
MN : Je pense que les adultes ont le droit de porter
les vêtements qu’ils veulent, bien que ce soit souvent plus une liberté
formelle que réelle, mais le niqab est un sac qui enferme le corps des
femmes, c’est une prison mobile.
FS : Vous dites qu’en Grande-Bretagne et même dans
les « pays musulmans », les ex-musulmans vivent dans la peur de subir
des représailles pour avoir abandonné leur religion et que « beaucoup
ont peur d’admettre qu’ils n’ont plus la foi ». Pouvez-vous nous parler
de ce « tsunami d’athéisme » qui aurait lieu dans ces pays et comment
ces gens sont réduits au silence et ostracisés pour avoir déserté
l’islam ?
MN : Internet fait pour l’islam ce que la presse à
imprimer a fait pour la chrétienté dans le passé. Les réseaux sociaux
n’ont pas seulement donné à d’innombrables jeunes un accès aux idées
« interdites » et un espace pour s’exprimer alors qu’ils n’en avaient
aucun auparavant, mais ils leur ont aussi permis de trouver des gens qui
partagent leurs idées, d’échanger leurs histoires et de voir qu’ils ne
sont pas seuls à penser ainsi.
Cela leur a donné du courage et l’espoir de pouvoir
vivre comme ils l’entendent à l’avenir. C’est devenu un mouvement de
résistance global.
« L’athéisme progresse comme un tsunami » a déclaré
un responsable inquiet du régime islamique iranien. La « menace de
l’athéisme » explique pourquoi le gouvernement saoudien assimile
désormais l’athéisme au terrorisme et que le ministère de la jeunesse
d’Egypte ait rejoint la plus haute autorité sunnite, l’université
Al-Azhar, pour combattre ensemble l’« extrémisme et l’athéisme ».
Nous sommes littéralement des millions
d’ex-musulmans, dans chaque maison et dans chaque famille, à chaque coin
de rue, dans chaque ville, dans chaque village, dans toute la
Grande-Bretagne et dans le monde.
(1) On appelle « Bounty » ou « Noix de coco »–brun à
l’extérieur, blanc à l’intérieur—des personnes « issues des minorités »
ayant adopté les idées et comportements occidentaux (expression à
connotation raciste – « mais quand il s’agit de nous, nous devenons à
leurs yeux des « autochtones » et des « noix de coco » si nous demandons
la même chose »).
Source : https://revolutionfeministe.wordpress.com/2017/01/29/rompre-avec-lislam/
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