(PARIS) – Nous avons réalisé un collage (affiche en fin d’article) sur
différents lieux de la région parisienne, pour lutter contre les
violences sexistes. Au Transfo, nous avons collé et affiché en texte
central : « Pas d’espace pour les agresseurs ! Pas d’agresseurs dans nos
espaces ! ». Parmi les réactions suscitées par ces collages, la
majorité de celles qui sont venues du squat du Transfo (Bagnolet) se
démarquent par leur caractère antiféministe et autoritaire. Pendant les
semaines qui ont suivi, si on écoutait les commentaires de certain-e-s
sans se poser de questions, il aurait fallu croire que le problème
venait du collage réalisé par des anarchistes-féministes pour dénoncer
des violences sexistes, et non pas de ces violences sexistes
elles-mêmes. Le collage a été diabolisé et marqué par plusieurs
agressions de certaines d’entre nous.
ANARCHISME ET FEMINISME
ANARCHISME ET FEMINISME
En tant qu’anarchistes-féministes nous partageons des
principes éthiques et des pratiques d’entraide et de solidarité contre
les violences hétéro-patriarcales. Nous luttons en amont contre les
violences sexistes pour les prévenir : créer des liens entre des femmes,
discussions, partage d’analyses et de textes, autodéfenses, ouvertures
et prises d’espaces occupés non-mixtes. L’hétéro-patriarcat est un
système d’organisation sociale, politique et économique qui institue
notamment la domination des hommes contre les femmes. Il est absurde de
penser que le patriarcat peut s’esquiver. Les agressions sexistes comme
les viols, les violences conjugales, les harcèlements, arrivent
nécessairement, et c’est pour cela que nous appelons à des
positionnements individuels, et des positionnements collectifs de lieux
d’habitations et de lutte pour que différents principes, tels que
l’ostracisation des agresseurs, soient mis en pratique, en solidarité
avec des femmes ayant subi ces violences sexistes. En tant
qu’anarchistes-féministes, nous refusons fermement de faire appel à la
police, à la justice ou à une quelconque médiation de l’Etat, pour en
finir avec des agresseurs. Nous refusons toutes les médiations, et toute
autorité d’un milieu. Nous sommes pour l’action directe et
l’autodéfense des femmes. Nous refusons de réduire ces questions à des
problèmes inter-individuels qui ne devraient pas venir troubler les
‘‘vraies’’ luttes. La guerre sociale est partout, tout le temps. Nous
refusons fermement ‘‘le cas par cas’’ qui consisterait dans la pratique à
une justice informelle, que nous propose des dits ‘‘antiautoritaires’’
qui veulent être juges. Nous ne reconnaissons aucune autorité et ne
déléguerons à aucune autorité la capacité de dire si nous avons subi des
violences sexistes ou non. Concernant les procès proposés par des dits
‘‘anti-autoritaires’’, nous rejetons dans le détail leur proposition :
confrontation agresseurs/ agressées, injonction faites aux femmes à
rendre publique et donner des détails de ce qu’elles ont subi, et
enquêtes sociales informelles (faites qui plus est contre les agressées
pour trouver des éléments à leur reprocher et les rendre responsable de
l’agression). Nous refusons que les femmes qui ont subi des violences
sexistes soient mises en danger et subissent encore plus de violences
sexistes (indifférence, voyeurisme, culpabilisation, infantilisation,
humiliations, malveillance, harcèlement, mépris et curiosités misogynes,
mise sous pression et stress, revivre traumatisme…) de la part de dit
‘‘antiautoritaires’’ aux pratiques de juges, de flics, de psy, etc…
PAS D’AGRESSEURS DANS NOS ESPACES ! PAS D’ESPACE POUR LES AGRESSEURS !
Ce collage a révélé que la situation actuelle dans la
plupart des lieux d’habitation ou de lutte est affligeante de lâcheté,
d’antiféminisme et d’autoritarisme. Certains espaces soutiennent les
agresseurs, les hébergent, les tolèrent et leur permettent de continuer
de faire subir ces mêmes violences sexistes à d’autres femmes. Le
Transfo (comme certains squats d’habitation, ou espaces de lutte) n’a
aucune position concernant l’ostracisation des agresseurs. Certain-e-s
habitant-e-s et participant-e-s du Transfo s’enlisent dans une position
de défense d’un agresseur sexiste notoire habitant du Transfo. Les
espaces qui n’ostracisent pas les agresseurs méprisent, isolent,
excluent de fait les femmes ayant subi des violences sexistes. Nous ne
considérons pas comme nécessaire que les agresseurs reconnaissent ce
qu’ils ont fait pour mener une action contre eux. Si les agresseurs
reconnaissent ce qu’ils ont fait : ça ne changera rien au fait que nous
mènerons une action contre eux.
Nous rejetons cette culture chrétienne et morbide du
pardon. Dans l’immense majorité des cas, les agresseurs ne reconnaissent
pas les harcèlements, les violences conjugales, les viols qu’ils font
subir aux femmes ; au contraire, avant et après, ils harcèlent et
contrôlent les femmes qu’ils ont agressées, cherchent à les punir parce
qu’elles ont osé dire/ ou qu’elles pourraient dire/ ce qu’elles ont subi
ou subissent encore. Les agresseurs et leurs soutiens mènent de
véritables campagnes de décrédibilisation des femmes qu’ils ont/ qui ont
été/ agressées, ce qui a pour conséquence que quoi que diront ces
femmes, elles ne seront pas entendues. Nous refusons de discuter avec
des ennemis politiques, avec ceux qui incarnent les différents systèmes
d’oppressions : des flics… aux agresseurs hétéro-sexistes. Nous
n’évoluerons pas dans les mêmes espaces qu’eux, les agresseurs ayant
bien compris où étaient leurs intérêts, ils s’en prennent
systématiquement aux anarchistes-féministes.
ANTIFEMINISMES : NEGATION DES VIOLENCES SEXISTES.
Systématiquement les réactions des antiféministes
s’inscrivent dans la négation des violences sexistes. Ils/elles ne
veulent pas entendre, ni voir, ni que l’on visibilise les violences
sexistes comme nous avons pu le faire avec le collage. Systématiquement
ils/elles nient, euphémisent, banalisent et attribuent une signification
différente à tel ou tel fait, quelque soit leur gravité. Ils/elles
assignent au silence les femmes ayant subi des violences sexistes quand
elles et ils ne vont pas jusqu’à les agresser verbalement ou
physiquement pour maintenir la pacification dans les différents milieux
politiques.
ANTIFEMINISMES : NEGATION DES SYSTEMES DE DOMINATIONS HETERO-PATRIARCAUX.
Les antiféministes refusent de reconnaître
l’existence des systèmes de dominations hétéro-patriarcaux, laissant en
place, où y substituant :
- du gauchisme : c’est à dire une lutte androcentrée et parcellaire contre le capitalisme.
- des analyses libérales et autoritaires : où les
violences sexistes seraient une affaire de ‘‘personnalité’’, de
‘‘caractère’’, de ‘‘psy’’, de ‘‘déviants’’ (alcoolique, toxico), de
rapport inter-individuel.
- des analyses racistes : où les violences sexistes seraient l’apanage des hommes racisés.
- des analyses bourgeoises : où les violences
sexistes seraient le fait des classes populaires, peu éduquées. Or
l’hétéro-patriarcat est un système d’organisation sociale, politique et
économique qui institue la domination des hommes contre les femmes. Ce
système d’oppression est inter-classiste, et ne connaît ni milieu, ni
frontière.
ANTIFEMINISMES : FAUX ARGUMENTS.
Certain-e-s antiféministes accusent le collage d’être
essentialiste. Or le fait de partir de situations d’oppressions
sexistes réellement vécues ne revient pas à revendiquer une identité
féminine. Pour sortir d’une cage encore faut-il être capable d’en voir
les barreaux. Nous partons de vécus de femmes en tant que catégorie
construite socialement parce que nous n’attendons pas que les dominants
nous libèrent ou aillent à l’encontre de leurs intérêts. Nous dénonçons
les analyses libérales et hypocrites des hommes qui affirment ne pas se
reconnaître dans la catégorie ‘‘hommes’’ tout en continuant à tirer des
privilèges qui découlent systématiquement de cette position sociale et
auxquels ils ne sont pas prêts à renoncer.
ANTIFEMINISTES : PORTE PAROLE DES AGRESSEURS.
L’antiféminisme (de l’antiféminisme des fascistes… à
l’antiféminisme des communistes ou anarchistes) est une expression
directe de la misogynie. Les antiféministes, femmes comme hommes, ont la
haine des femmes. Cependant nous ne mettons pas sur le même plan ces
deux positions. Pour les femmes, l’antiféminisme provient en grande
partie d’une position de survie qui passe par l’association avec les
dominants, l’identification aux oppresseurs, et la haine de soi. Alors
que pour les hommes antiféministes, il s’agit d’une position de
solidarité masculine. Être solidaire des agresseurs est un moyen pour
eux de se couvrir, tout en couvrant les autres et d’asseoir le pouvoir
des hommes contre les femmes. Les agresseurs instrumentalisent ou
rallient des femmes misogynes contre les femmes qu’ils ont agressées, ou
leurs soutiens, soit préventivement, soit pour poursuivre leur sale
boulot d’agression et maintenir leur place dans un espace.
ANTIFEMINISTES : UN SEUL BUT REHABILITER LES AGRESSEURS.
Les antiféministes nous attaquent, nous
culpabilisent, et inversent les responsabilités en faisant de l’opprimée
une ‘‘oppresseuse’’. Ils/elles cherchent à discréditer les femmes ayant
subi des violences sexistes et leurs soutiens par tous les moyens.
Ils/elles utilisent les pratiques des agresseurs : validation de la
victimisation des agresseurs, manipulations et calomnies. Ils/elles
attaquent de manière insidieuse les femmes en leur renvoyant à la gueule
les violences sexistes qu’elles ont subies. Enfin, les antiféministes
sont des poukaves (préviennent, informent les agresseurs) et mettent en
danger la vie des femmes ayant subi des violences sexistes. Les
antiféministes sont prêts à défier toutes logiques, rationalités, et
tous principes éthiques. Ils/elles n’ont qu’un seul objectif :
réhabiliter les agresseurs. Et en plus de cela, ils/elles nous accusent
d’’’inefficacité’’ dans nos luttes contre des systèmes d’oppressions
hétéro-patriarcaux contre lesquelles ils/elles ne luttent pas mais
contribuent à les renforcer. Les antiféministes sont incapables
d’entraide envers les femmes ayant subi des violences sexistes,
ils/elles sont contre l’ostracisation des agresseurs, et de plus,
ils/elles cherchent à décourager, démobiliser et réprimer toutes formes
d’entraide, de solidarité et d’actions contre les violences
hétérosexistes, en étant contre la non-mixité offensive.
AGRESSIONS D’ANARCHISTES-FEMINISTES AU TRANSFO PENDANT,ET APRES LE COLLAGE.
Nous avons été accusées d’agression envers un
agresseur habitant du Transfo pendant le collage anarchiste-féministe,
sur la seule base des mensonges, de la manipulation et de la
victimisation de cet homme. Les habitant-e-s et les participant-e-s de
l’AG du Transfo sont au courant que C. a fait subir des violences
conjugales à plusieurs femmes. Nous avons appris que C. avait
instrumentalisé la mort de sa mère pour se victimiser, inventant de
toutes pièces des insultes que nous aurions proférées contre elle et
manipulant les personnes autour de lui. Ce genre de procédé est
particulièrement abject. En réalité, le jour du collage, une fois que C.
a lu les affiches, il a cherché par différentes façons à nous
intimider.
Il a d’abord tenté de mettre la pression à celle
d’entre nous qui a déjà eu à subir des violences conjugales de sa part,
pour essayer d’obtenir sa complicité et lui faire dire qu’il n’était en
rien concerné par les affiches. Puis, alors que nous partions, il nous a
suivies dans la rue avec une attitude et des propos menaçants alors que
nous lui demandions d’abord calmement, puis plus vivement, de ne pas le
faire. Pour finir, il a cherché à renverser la situation et ainsi
passer du statut d’agresseur à celui de victime en évoquant des faits
hors de propos et sans aucun rapport avec le collage. Si C. est un
menteur et un manipulateur, cela ne déresponsabilise en rien ceux qui
ont contribué et contribuent encore à sa victimisation. D’autant plus
que celle d’entre nous qui a été accusée à tort d’avoir ‘‘insulté la
mère de C.’’ a ensuite été agressée physiquement à deux reprises par une
habitante du Transfo qui, en plus de donner libre cours à son
antiféminisme haineux, cherche à soutenir un agresseur sexiste contre
des anarchistes-féministes. Les antiféministes et autoritaires n’ont pas
à se mettre sur notre chemin, si nous avions mené une action d’attaque
de C. cela n’aurait toujours pas justifié le fait d’être agressées. Ces
précisions faites, nous refusons que ce collage se réduise à C. ! Le
collage est contre lui et contre tous les autres agresseurs !
Tout ce que nous aurions pu entreprendre comme action
anarchiste-féministe aurait eu pour conséquences que certains
agresseurs comme C. se sentent visés et cherchent par tous les moyens à
noyer le poisson, parce que C., comme d’autres, ont pleinement
conscience des violences sexistes qu’ils ont exercées et exercent
encore. Une grande partie des habitant-e-s et des participant-e-s au
Transfo choisissent de fermer les yeux sur les agressions sexistes
réelles que subissent les femmes. Par contre ils/elles savent s’indigner
publiquement pour une fausse agression d’agresseur-habitant ainsi que
pour un collage anarchiste-féministe qui serait ‘‘violent’’. Alors que
la forme que prendrait le collage avait été acceptée par l’AG,
certain-e-s se plaignent aujourd’hui, sur la base de leur fonctionnement
autoritaire, que nous n’ayons pas prévenu date et heure, et que nous
n’ayons pas été encadrées pendant le collage. Précisons d’ailleurs que
si ces conditions avaient été posées, nous aurions refusé de faire le
collage. Nous avons fait un collage collectif, non pas militant
(formalisme, suivisme, division des tâches) ou artistique (donc pas de
spectateurs) (Relire CR. AG du 8 septembre). Certain-e-s habitant-e-s et
participant-e-s à l’AG du Transfo qui sont au courant concernant C. le
soutiennent sur des bases autoritaires, par suivisme affinitaire (de
pote) et identitaire (de squat/Transfo), par absence d’éthique
individuelle et collective concernant les violences sexistes, par
misogynie et par antiféminisme. Certain-e-s habitant-e-s autoritaires et
antiféministes vont plus loin que d’autres, ils revendiquent l’espace
collectif du Transfo comme étant leur propriété d’habitant et remettent
en cause l’autonomie de l’espace collectif du Transfo par rapport à
l’espace d’habitation. En bons autoritaires, ils/elles créent de toutes
pièces des ‘‘ennemies extérieures’’ qui attaqueraient,
déstabiliseraient, l’espace d’habitation et le Transfo, inventent ‘‘un
groupe’’ qui serait ‘‘ne compte pas sur notre silence’’ et qu’il serait
nécessaire d’exclure. Nous sommes allées à l’AG du 3/11 (le lendemain du
collage), et sachant par avance qu’une discussion sur le fond ne serait
pas possible pendant l’AG, nous avons décidé d’y participer pour
proposer à celles qui seraient intéressées un cadre dans lequel une
telle discussion serait possible.
Nous n’avions alors pas souhaité démentir les
accusations d’un agresseur-sexiste-notoire habitant du Transfo
(accessoirement, non présent à l’AG du 3/11) parce que nous refusions de
discuter avec un agresseur (et à partir de ses propos) ou par la
médiation de ses représentant-e-s habitant-e-s antiféministes et
autoritaires. Et surtout, nous n’avions pas souhaité démentir parce que
ça ne devrait pas être à nous de gérer les pratiques d’agresseurs
lorsqu’ils calomnient, se victimisent et manipulent, mais aux personnes
qui tolèrent ces agresseurs dans les espaces d’habitation ou collectifs.
À l’imagedu climat qui rendait impossible une discussion de fond en AG,
une participante de l’AG s’est mise sur notre chemin pour nous empêcher
de sortir de la salle après notre intervention, bloquant la porte, nous
empêchant de partir, nous donnant des ordres, exerçant une pression
physique et verbale autoritaire et antiféministe (« vous retournez
l’oppression à l’envers », « vous allez rester ici on va discuter de vos
méthodes et pratiques », « on va pas chez les gens pour insulter leur
mère. Insulter la mère des gens c’est politique. »). Après quelques
minutes d’attente, elle a été maîtrisée physiquement par des
participante-s de l’AG. L’AG ne s’est pas positionnée pour affirmer son
soutien au collage contre les violences sexistes, et c’est dans ce
contexte que certaines personnes se permettent de prendre la défense
d’agresseurs, par une surenchère de comportements violents. La situation
est hautement problématique. Il est inacceptable qu’un simple collage
suscite de telles violences réactionnaires. Des positionnements
individuels et collectifs clairs sont nécessaires pour condamner cette
répression antiféministe et autoritaire. La question des violences
sexistes est très loin d’être accessoire, et personne ne peut esquiver
ce problème sans être complice de leur renforcement. Il est
indispensable que chaque individu et collectif développent dès
maintenant une éthique leur permettant de se confronter et de lutter
contre ces oppressions. Nous encourageons et soutenons les femmes
anti-autoritaires, anarchistes à s’organiser en non-mixité sans
autorité, direction, contrôle masculin, afin de pouvoir prendre
conscience de l’oppression hétéro-sexiste, construire une autonomie
individuelle et collective, développer une éthique et des pratiques
d’entraides et de solidarités contre l’hétéro-patriarcat. Substituons à
la résignation l’affrontement de l’hétéro-patriarcat (de la galanterie
au meurtre) contre ce-ux qui nous opprime-nt et ce-ux qui nous
détrui-sent.
Contre toute domination, autorité, exploitation, et oppression, détruisons le patriarcat et la société qui va avec !
Des anarchistes féministes.
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