Voici un texte traduit par Hypathia (voir l’adresse de son blog
tout en bas) que nous avons souhaité diffuser car il explique
parfaitement une idée qui trotte dans nos têtes depuis un bon moment :
" Les tueurs de masse n’ont pas une vision pervertie de la masculinité, mais les hommes libéraux, oui.
Cette semaine je vous propose avec son accord cet
article de @MayorWatermelon, environnementaliste radical, pro-féministe,
selon son profil Twitter. Les tueries de masse individuelles (Andreas
Lubitz), d’extrême-droite -Anders Breivik-, les actes terroristes
dijhadistes : Paris, Orlando, Nice, Munich, Saint-Etienne du Rouvray...,
pour ne citer que les plus récents, sont perpétrés par des hommes à
99 %. Prenant conscience de l’horreur, des mouvements libéraux aux USA,
mais aussi en Europe, -souvent masculinistes- souhaitent restaurer
l’image du masculin en promouvant une "masculinité saine". Cet article
leur répond.
Mass killers don’t have a warp view of masculinity -liberal men do " - texte original en anglais." Les tueurs de masse n’ont pas une vision pervertie de la masculinité, mais les hommes libéraux, oui.
Il y a quelque chose de mauvais chez les hommes, quelque chose d’évidemment, indéniablement, tragiquement mauvais.
Il y a quelque chose qui nous conduit à violer,
battre, acheter et vendre des femmes. Il y a quelque chose qui nous
conduit à transgresser, puis à en rire, et à atteindre l’orgasme à
travers cette transgression. Il y a quelque chose qui nous conduit à
nous tuer les uns les autres, à exécuter nos partenaires et nos enfants.
Quelque chose nous conduit à brûler des cités
entières, à lâcher des bombes, à déclarer des guerres et envahir les
nations, à conquérir des terres libres et les faire nôtres. Et il y a
quelque chose qui nous emmène dans des salles de cinéma, des centres
commerciaux, des écoles élémentaires, avec des fusils en bandoulière.
Nous avons concocté tant de raisons pour faire ce que
nous faisons : la Religion, la politique, la maladie mentale, la nature
humaine, une folle fierté. Pourtant les femmes pratiquent aussi des
cultes, votent, tombent malades, partagent également l’entière
expérience humaine, tout ça sans pour autant décider de tuer des
étrangers dans une ultime explosion de violence.
Les femmes commettent peut-être un dixième de tous
les meurtres, et moins d’un dixième d’un pour cent de toutes les tueries
de masse. Quand on enlève du panel des tueurs toutes les femmes qui
tuent en situation de légitime défense des agresseurs étrangers ou des
partenaires, le chiffre descend encore. Nier la nature spécifique des
atrocités masculines est se duper soi-même.
Il y a une psychologie, pas une biologie, qui
accompagne ces crimes ; nous ne tuons pas pour ce que nous sommes, mais
pour qui nous sommes. Un système de croyances sur le monde, une
collection de désirs et de fantasmes déterminent la signification de la
masculinité beaucoup plus que la densité osseuse ou la forme génitale.
Cette idéologie est la même, que ces crimes soient commis en privé
contre une épouse ou une amie, ou fièrement contre le reste du monde
vivant.
Le droit, la rage, la brutalité, le désir
pathologique de franchir les frontières de l’Autre définit aussi bien
Christophe Colomb et Andrew Jackson*, que Ted Bundy* ou Eric Harris*.
Ces actes sont unis par un ensemble de traits, liés ensemble à travers
l’histoire. Il y a un mot pour ce qui ne va pas chez les hommes. Il y a
un tas de mots, bien sûr. Mais il y a un seul mot qui signifie tous les
autres.
Le mot pour ce qui est mauvais chez les hommes
apparaît momentanément dans toutes les tueries de masse, mais il est
toujours accompagné. Ce mot est masculinité, et ses addenda sont
nombreux dans le discours public : Confus. En crise. Défectueux.
Perverti. Un article récent proclame que les hommes tuent sur des
parkings d’universités parce qu’on leur enseigne une "vision défectueuse
de la masculinité". Un autre se lamente sur la façon dont l’Amérique
nourrit "des conceptions toxiques de ce qu’est être un homme".
Ce qu’implique l’omniprésence de ces adjectifs est
clairement que la violence masculine a ses racines dans une
incompréhension fondamentale de la nature de la virilité, pas de la
virilité elle-même.
Il y a sûrement pas mal d’hommes dont la
compréhension de la masculinité est tragiquement une illusion
-malheureusement, ce sont ceux qui écrivent tous ces éditoriaux, pas
ceux qui tirent dans les écoles. Les hommes qui tuent ou violent au
hasard, ceux qui battent leur femme et leurs enfants à mort ne se
trompent pas sur la masculinité. Leur violence psychotique, leur vide
émotionnel, leur cruauté aveugle, montrent qu’il la comprennent
parfaitement -mortellement bien.
Répondre au rejet par une femme en tirant sur neuf
étrangers puis sur soi-même, c’est exprimer le diktat d’une masculinité
dans sa forme la plus concentrée : exigez ce que vous voulez. Utilisez
la violence pour le prendre. Détruisez ce que vous ne pouvez avoir.
C’est l’idéologie de la virilité. Il n’y a rien de défectueux, confus ou
imparfait à son propos. Et ce n’est pas non plus une forme toxique de
quelque chose de bénin ailleurs.
La vraie confusion toxique de ce que signifie la
masculinité se trouve chez les réformateurs, ces hommes qui espèrent
remplacer dix mille ans de psychologie de la domination par une
"masculinité saine" composée de gentillesse, de compassion, de
leadership et de désir de disposer. Il n’y a aucun moyen de façonner une
psychologie sex-spécifique à partir d’une décence humaine de base. Ces
traits se sont manifestés à travers l’histoire par les hommes comme par
les femmes ; mais la violence de hasard et les explosions de rage sont
généralement du domaine des hommes.
Il n’y a jamais eu besoin d’un mot pour décrire la
psychologie d’un homme adulte sain et fonctionnel en dehors de c’est une
"bonne personne". Il y a eu, cependant, un très pressant besoin de
créer un mot pour les qualités dont les hommes ont besoin pour garder
leur pouvoir sur les femmes.
La plupart des traits qui définissent la notion
libérale de "masculinité saine" ne peuvent être débarrassés de leurs
racines patriarcales. Il n’y a rien de sain dans la notion que les
hommes sont les uniques pourvoyeurs, défenseurs ou leaders.
Historiquement, l’association hommes et protection accompagne
l’association femmes et propriété, tout comme le rôle de mâle leader
existe avec le parallèle de la femme disciple.
Ces interprétations supposées éclairées de la
masculinité reposent sur et perpétuent un système de division genrée où
les hommes maintiennent un contrôle tacite sur les femmes. La vision
réellement progressiste qu’aucun comportement n’est valable plus ou
moins en fonction de son appareil génital, n’a aucune place dans le
réformisme néo-romantique de la virilité moderne.
La notion libérale de "masculinité saine" est soit un
détournement, soit un mensonge. Détourner la masculinité en un terme
vide non distinguable
d’ "humain décent" peut être a-historique ou dénué de sens, ou le fait d’un patriarcat bénin qui confirme la stratification sexuée au cœur du pouvoir mâle. Mais ce que cela ne peut être, c’est un antidote à la psychologie militarisée de la domination qui conduit aux atrocités masculines allant des tueries de masse aux génocides.
d’ "humain décent" peut être a-historique ou dénué de sens, ou le fait d’un patriarcat bénin qui confirme la stratification sexuée au cœur du pouvoir mâle. Mais ce que cela ne peut être, c’est un antidote à la psychologie militarisée de la domination qui conduit aux atrocités masculines allant des tueries de masse aux génocides.
Il y a quelque chose de mauvais chez les hommes
-quelque chose d’évidemment, d’indéniablement, de tragiquement mauvais.
Cependant ce n’est pas particulièrement perçu comme mauvais par les
hommes en ce sens que les explosions de violence font beaucoup pour
maintenir et renforcer la main de fer du pouvoir que nous avons sur les
femmes. Le concept de "masculinité saine" permet aux hommes libéraux de
partager ce pouvoir incontesté tout en prenant leurs distances par
rapport au sale travail requis pour le maintenir.
Célébrer une masculinité saine, c’est célébrer une
version aseptisée du massacre, quelque chose qui nous accorde l’entrée
dans un club exclusif, sans exiger de sacrifice. Un homme pourrait être
tendre, faire l’amour avec douceur, pleurer occasionnellement, le tout
dans le confort de l’idée que pendant qu’il pleure, réconforte et baise,
d’autres hommes hurlent, battent et violent, pour s’assurer que son
pouvoir reste incontesté ?
Si nous voulons sérieusement mettre un terme aux
tueries de masse, et dans une moindre mesure au viol et à la violence
conjugale, nous ne pouvons pas nous permettre de nous exonérer de ces
crimes en utilisant les mots "toxiques", "confus", ou "perverti". La
masculinité en elle-même est toutes ces choses bien sûr, invariablement
toxique, invariablement confuse, et invariablement pervertie. Mais si la
compréhension que les hommes violents ont de la masculinité est chez
eux bien repérée, ceux qui fantasment une masculinité purgée de la
violence et de la cruauté, ceux-là se trompent désespérément de projet.
La société ne nous enseigne pas des idées toxiques à
propos de la virilité. Elle nous apprend une idée toxique appelée
virilité -une idée dont quantité de réformes ne pourront faire
l’économie. "
@MayorWatermelon
@MayorWatermelon
*Respectivement, après Colomb découvreur de
l’Amérique, donc colonisateur précurseur, 7ème Président des Etats-Unis,
tueur en série et tueur de masse
Source :http://hypathie.blogspot.fr/2016/07/masculinite-toxique-deni-des-hommes.html
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