Définitions :
Intime :
Quelque chose qui fait partie de la vie d’une
personne et qu’elle ne souhaite pas partager et/ou rendre public, si ce
n’est, éventuellement, avec un nombre très restreint de personnes.
L’intime peut concerner les relations interindividuelles mais pas
obligatoirement. Dans une société où les pouvoirs institutionnels
(relayés par les rapports de domination interpersonnels) tendent à
investir tous les espaces de vie, la préservation des intimités est une
forme de résistance.
Privé :
Ce qui est censé échapper aux regards et aux règles
qui régissent la vie publique, parce que réservé/appartenant à une
personne, ou à un groupe de personnes regroupées au sein d’un
« ménage », d’une famille ou d’une « personne morale » (ex :
associations loi 1901). La notion de vie privée est, dans notre société,
intimement liée à celle de propriété privée. Contrairement à
l’intimité, la « vie privée » est instituée par le système patriarcal et
capitaliste et encadrée par des lois (code civil).
Public :
Ce qui concerne l’ensemble des individus au sein d’un groupe, ce qui leur est commun.
Politique :
Organisation de la vie publique. Ensemble des codes
et des règles qui régissent les rapports entre les individus en leur
assignant une place et un rôle au sein de la collectivité. La politique
désigne aussi les tensions et les rapports de force entre les pouvoirs
et les sphères de résistances.
Tout acte humain a un sens politique quel que soit le
contexte (public ou privé). Car il engage la responsabilité de la
personne vis à vis d’elle-même et des autres. Il découle des choix
éthiques et stratégiques, conscients ou inconscients, de cette personne
et traduit donc sa relation au monde, la manière dont elle
définit/différencie ce qui est « bon » et/de ce qui est « mauvais ».
La séparation entre le privé et le politique est
arbitraire. Elle est le fruit d’une construction sociale et un
instrument d’oppression.
La vie privé des femmes est sans cesse étalée sur la
place publique (prise en compte de la situation maritale et familiale
comme critères de non embauche par les patron-ne-s, politiques
familiales natalistes et débats à propos de l’adéquation entre « vie
professionnelle » et « vie familiale » qui semble ne concerner que les
mères, utilisation récurrente par les administrations, les instituts de
sondages et les médias des termes « mademoiselle », « nom de jeune
fille » - voire « nom de femme » - et « ménagère »).
Même s’il y a de moins en moins de « femmes au
foyer », les tâches ménagères restent très inégalement réparties. Les
femmes sont habituellement renvoyées, au moins symboliquement, à la
sphère privée-familiale. Elles sont donc désindividualisées (notamment
via la propagande diffusée par la presse « féminine » : recettes de
cuisine, déco d’intérieur, potins et tests psy, « beauté », et
publicités à profusion). En revanche les hommes sont, la plupart du
temps, renvoyés à la sphère publique à titre individuel (carrière
professionnelle).
Les normes et schémas de domination conditionnent,
notamment via l’éducation, les rapports de pouvoir dans le domaine
intime (ex : les constructions d’identités de genre et les rapports de
subordination /domination qu’elles induisent). C’est pourquoi il est
nécessaire d’agir à ces deux niveaux si on souhaite réellement combattre
le patriarcat. Le peu d’effets que les réformes du code civil ont eu
sur la réalité quotidienne depuis l’abolition (dans la loi) du « chef de
famille » démontrent que, sans un effort de déconditionnement profond
des mentalités, l’action dans le domaine public n’a que peu
d’efficacité. Et si elle en a, c’est bien parce qu’indirectement elle
contribue en partie à l’enclenchement d’un processus de
déconditionnement. Preuve qu’il n’y a pas de véritable frontière entre
les deux notions. La croyance en une frontière étanche entre les sphères
privées et la sphère politique sert de refuge aux militant-e-s
« progressistes » qui préfèrent maintenir une hiérarchie entre les
luttes, la lutte contre le patriarcat étant reléguée à une place
subalterne : « ça c’est la vie privée, ça nous regarde pas... », comme
si analyser, critiquer et dénoncer la domination genrée au sein des
espaces privés revenait à vouloir exercer une coercition à l’égard de
ces espaces privés. C’est confondre la pratique de la subversion avec un
mode d’intervention autoritaire.
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