La prostitution est un des piliers fondamentaux du puritanisme et du patriarcat.
Même si les prostitué-e-s ne se reconnaissent pas
tou-te-s dans la catégorie "femme", elle-il-s s’identifient rarement
comme appartenant à une catégorie de genre "masculin". Ce qui n’est pas
le cas des client-e-s. La prostitution entérine en effet l’idée selon
laquelle seules les personnes de genre masculin éprouvent un réel
intérêt pour les activités sexuelles, et entretient le mythe d’une
vénalité "naturelle" qui serait propre aux personnes assignées au genre
féminin.
Dans la prostitution le patriarcat, le puritanisme et
le capitalisme interagissent pour se renforcer les uns les autres. Le
patriarcat construit, pour se pérenniser, des carcans identitaires
auxquels les femmes doivent se conformer. Ils se divisent en deux
grandes catégories. D’une part la femme « purifiée » qui appartient à un
seul homme, lavée de son « impureté originelle » en accédant au rôle
sacralisé de la mère qui « enfante dans la douleur » et se voit amputée
de sa sexualité. D’autre part, celle qui est « impure », appartient à
tous les hommes et sert de réceptacle aux pulsions sexuelles des
dominants afin de préserver la « vertu » de l’autre femme. Objets
sacralisés ou méprisés, on les oppose alors qu’elles sont les deux
facettes de la même femme, aliénable ou aliénée, jamais propriétaire
d’elle même. Il existe de multiples formes de relations
prostitutionnelles qui ne sont pas reconnues comme telles (ex :
dépendance économique et "devoir conjugal" des "femmes au foyer"). La
prostitution participe à leur maintient au travers des représentations
qu’elle véhicule par sa simple existence.
Dès le Moyen Âge l’Église est favorable à la
prostitution. « Supprimez les prostituées, vous troublerez la société
par le libertinage » disait Saint Augustin. En réalité, l’idéologie
puritaine rejette davantage la liberté sexuelle que la prostitution car
cette dernière lui sert d’exutoire. Elle a tout intérêt à entretenir la
confusion entre les deux pour occulter l’existence potentielle ou vécue
d’une jouissance inaliénable. Les « travailleu-se-r-s du sexe »
légitimistes déclarent ne pas vendre leur corps mais un « service
sexuel ». Ce « service » se traduit quoiqu’il en soit par une mise à
disposition du corps. Une sorte de location, comme si le corps d’une
personne était un objet extérieur à elle-même. Et c’est à ce rapport
détaché à leur propre corps que les prostitué-e-s sont contraint-e-s de
se soumettre pour satisfaire les exigences de leurs client-e-s. Ce
rapport d’extériorité au corps est banalisé car profondément intégré
dans les mentalités. Il est le fruit du conditionnement mental puritain
qui consiste à séparer ce qui est supposé être « le corps » de ce qui
est supposé être « l’esprit » en les plaçant dans un rapport
hiérarchique. Puisque le corps est jugé « inférieur », il peut alors
servir d’ustensile, d’outil de travail.
D’autre part, au travers de la pornographie
commerciale dite « professionnelle », de la publicité sexiste et des
différentes formes de prostitutions, le capitalisme a intérêt à faire
passer la consommation de sexe pour la liberté sexuelle, et faire de la
sexualité un produit qui se vend plutôt qu’un plaisir qui se partage. Le
mot « travail » signifie « instrument de torture ». En fait, il s’agit
d’une activité qui se voit transformée en contrainte, en obligation de
fournir des efforts, par le capitalisme via le salariat et les rapports
marchands. Pour que le travail soit aboli, il faudrait que les activités
socialement utiles soient distribuées et exercées dans une dynamique de
partage et de gratuité et dans le respect des besoins et des désirs de
chacun-e. Non dans un maintien des rapports marchands qui, eux, sont
basés sur une logique d’échange.
La prostitution, c’est l’aliénation de la sexualité par le capitalisme !
La loi Sarkozy contre le « racolage passif »
criminalise les personnes prostituées. L’écrasante majorité d’entre
elles n’ont pas choisi de se prostituer parce qu’elles en éprouvaient le
désir, mais pour survivre en espérant que cette situation sera
temporaire.On entend souvent « Si elles déclarent que c’est un choix, où
est le problème ? ».D’une part elle-il-s sont minoritaires à déclarer
que « c’est un choix » et s’expriment pourtant au nom de tou-te-s,
d’autre part, qu’entendons nous par « c’est un choix » ?
Tout acte humain est le résultat d’un choix, mais ce
choix est la plupart du temps un choix par dépit, un consentement sans
désir. C’est ici que se situe la limite de l’intérêt du terme
« consentement Il y a une énorme différence entre la majorité des
prostituée- s et les « travailleu-se-r-s du sexe ». Ces dernier-e-s,
font de la propagande par l’acte et l’apologie de la prostitution. C’est
là un choix idéologique et politique libéraliste et non libertaire,
contre la liberté sexuelle. L’état français se prétend abolitionniste
alors que sa politique est un mélange de réglementation (prélèvement
d’impôts sur les revenus de la prostitution qui condamne les personnes à
une rentabilité accrue) et de prohibition (lois contre « le racolage
passif »). Si aucun pays n’applique véritablement une politique
abolitionniste c’est justement parce que l’abolitionnisme ne peut, en
fait, se concevoir que dans une démarche libertaire révolutionnaire.
Alors que le prohibitionnisme, comme le réglementarisme découlent
logiquement de tout système étatique et/ou capitaliste.
Donner un statut professionnel aux "travailleu-se-r-s
du sexe" c’est reconnaître une utilité sociale à la prostitution, c’est
adhérer à la morale puritaine, à la marchandisation et au patriarcat.
Quelques dizaines de "travailleu-se-r-s du sexe" regroupé-e-s dans ces
associations réglementaristes et légitimistes revendiquent ce statut.
Médiatiquement et politiquement ces revendications occultent une réalité
du phénomène prostitutionnel qui intéresse la grande majorité des
victimes de l’exploitation sexuelle. Croire que la réglementarisation
étoufferait l’exploitation sexuelle, c’est faire fi des profits
financiers qu’elle génère à travers la traite de centaines de milliers
de personnes dont certaines sont des enfants et de son aspect
international. Lorsque le capitalisme, le puritanisme et le patriarcat
auront été abolis, la prostitution sous toutes ses formes aura
disparu. ».
Commentaires
Enregistrer un commentaire