« Limiter des dégâts qu’on ne peut, de toute façon,
pas éviter« . Telle est l’idée de deux gynécologues américains qui nous
demandent de ne plus dire #excision ou #MGF (mutilations génitales
féminines) mais « excision minimaliste ». Des excisions « light » en
quelque sorte, qui évitent les complications médicales tout en
respectant la « coutume » !
« Nous ne disons pas que les interventions sur les
organes génitaux de la femmes sont souhaitables, mais plutôt que
certaines interventions devraient être tolérées par des sociétés
libérales »
De quoi ces nouvelles « altérations génitales
féminines » sont-elles le nom ? D’une « catastrophe », pour Pierre
Foldes, l’inventeur de la technique de réparation de l’excision :
« Ce n’est pas une chirurgie « minimale » car les
conséquences en sont dramatiques : certaines femmes peuvent le ressentir
très mal, parfois cela conduit à supprimer toute sexualité pour elles.
Et ce n’est pas de la médecine de faire des mutilations sur des femmes
non consentantes »
Une « catastrophe » qui n’a qu’une seule raison d’exister : l’argent !
« En France, les familles peuvent payer 6.000 euros
une exciseuse traditionnelle. Alors qu’on a obtenu que la réparation
soit indemnisée par la Sécurité sociale. »
Éduquer les gens en leur expliquant les conséquences,
c’est une bonne idée, sauf que malheureusement, ils sont au courant des
conséquences et c’est bien pour ça que l‘excision se pratique.
200 millions de femmes sont victimes d’excisions dans le monde, principalement en Afrique et au Moyen-Orient.
Qu’elle soit « minimaliste », comme le proposent ces
deux gynécologues réactionnaires en soif de profit, ou « coutumière »,
c’est résolument Non ! L’excision est un moyen de contrôle et à ce
titre, l’excision est une violence faite aux femmes. Rien d’autre.
Une femme devant une affiche anti-excision à Abidjan, en 2005. – KAMBOU SIA / AFP
Un « compromis » : c’est ainsi que Kavita Shah Arora
et Allan J.Jacobs présentent leur idée d’excision « minimaliste » dans
un article paru dans le Journal of medical ethics. Ils pensent qu’une
excision bénigne, qu’ils qualifient « d’altération génitale », pourrait
concilier la tradition culturelle et la santé des femmes alors que la
pratique de l’excision est en forte hausse aux Etats-Unis : 150.000 à
200.000 jeunes filles seraient susceptibles d’y être excisées et ce
chiffre a augmenté de 35 % entre 1990 et 2000, d’après les dernières
statistiques officielles sur le sujet.
A lire aussi : Deux gynécologues choquent en proposant des excisions « minimalistes »L’excision médicalisée, une fausse bonne idée
Les mutilations sexuelles féminines sont interdites
aux Etats-Unis depuis 1996. Mais les excisions clandestines, pratiquées
avec des outils rudimentaires, continuent et exposent les fillettes à de
graves complications médicales (hémorragies, infections, douleurs, puis
plus tard difficultés pendant les rapports sexuels et complications à
l’accouchement). Faire pratiquer les excisions par des médecins ne
serait pas une meilleure option, estime Isabelle Gillette-Faye,
sociologue et directrice du Gams (Groupe Femmes pour l’abolition des
mutilations sexuelles) :
« En Egypte par exemple, 50 % des excisions sont
pratiquées en milieu médical et paramédical, mais même en admettant que
ça peut éliminer le risque d’hémorragie et d’arrêt cardiaque, l’excision
demeure un traumatisme et les complications à moyen-terme restent
possibles. »
Une jeune fille de 13 ans est ainsi morte en Egypte
en 2013 des suites d’une excision pratiquée par un « convoi médical »
qui sillonnait les villages afin d’y exciser les jeunes filles.
Les gynécologues américains estiment eux que des
excisions qui n’auraient aucun effet durable sur l’apparence ou le
fonctionnement des organes génitaux, ou qui modifieraient « légèrement »
leur apparence sans effet durable sur la capacité de reproduction ou
l’épanouissement sexuel des femmes seraient tolérables, au même titre
que la circoncision, très pratiquée aux Etats-Unis toutes confessions
religieuses confondues. « Mais l’excision n’est pas l’équivalent de la
circoncision, rappelle Isabelle Gillette-Faye. L’équivalent, ce serait
une ablation du gland du pénis. »
Le chirurgien français Pierre Foldes, l’inventeur de
la technique de réparation de l’excision, a été confronté à quelques cas
de femmes qui avaient été excisées par des médecins : « C’est une
catastrophe », annonce-t-il d’emblée.
« Ce n’est pas une chirurgie « minimale » car les
conséquences en sont dramatiques : certaines femmes peuvent le ressentir
très mal, parfois cela conduit à supprimer toute sexualité pour elles.
Et ce n’est pas de la médecine de faire des mutilations sur des femmes
non consentantes », explique-t-il à 20 Minutes.
« Nous ne laissons pas des gens être « un peu » esclavagistes »
Pourquoi ces deux médecins américains ont-ils jeté ce
pavé dans la mare ? Pour éviter des catastrophes dans des familles qui
ne sont pas prêtes à abandonner cette pratique, selon eux. Pour le
business, selon Isabelle Gillette-Faye :
« C’est un moyen pour certains de se faire de
l’argent. Ça l’était à l’époque où l’excision était pratiquée aux
Etats-Unis sur des jeunes filles américaines, au 19e siècle notamment
avec le mouvement des orificialistes [qui excisaient les fillettes
coupables de se masturber]. »
Pierre Foldès rappelle que l’excision est aussi un trafic qui doit être dénoncé :
« En France, les familles peuvent payer 6.000 euros
une exciseuse traditionnelle. Alors qu’on a obtenu que la réparation
soit indemnisée par la Sécurité sociale. »
En 2010, des médecins américains avaient déjà avancé
une idée pour éviter que les familles n’envoient leurs filles à
l’étranger pour être excisée : une piqûre, qui serait administrée par un
docteur comme un rituel. La levée de bouclier des associations de
défense des femmes avait été unanime. Georganne Chapin, directrice de
l’association Intact America, avait déclaré :
« Il y a des pays dans le monde où il est permis de
battre sa femme, de réduire des gens en esclavage et d’abuser des
enfants, mais nous n’autorisons pas ces pratiques dans notre pays. Nous
ne laissons pas des gens être « un peu » esclavagistes ou de battre « un
peu » leur femme en disant qu’ils le feront de toute façon. »
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